Ce livre devait (si quelque chose devait) être écrit dans ma langue natale, serbo-croate. Mais les événements ont décidé autrement.
Parmi mille et deux problèmes techniques que Paul Valéry poète pose à son traducteur (au moins à celui de cette langue à double fil, serbo-croate) le “serpent” est central. Ce terrible personnage est… femme ! On l’appelle ZMIJA (zmiya). Pour traduire La Jeune Parque, pour continuer avec Ébauche d’un Serpent, – comment garder le féminin ; si chez Valéry dans ces deux poèmes tout se développe à partir de cette nette distinction des sexes ? Après tant d’”éloignements”, j’ai forgé le mot ZMIJAC (Zmiyats). Dans les années 68 c’était ma façon de rompre avec une mythologie. Etc.
Plusieurs années après j’ai su que j’étais le Serpent – dans le calendrier céleste des Chinois. Je le dis, pour l’imaginerie uniquement.
C’est pourquoi, depuis, même le Serpent Français sonne et signifie pour moi autre ment. Dès que je prononce ce nom, se lève en moi, et plus en plus avec le temps, une vague composée de tant de souvenirs, et d’idées.
“Sur” cette vague, j’ai fait mon livre.
Paris le 15 mars 1994